Je vous propose une courte biographie du pape François, l’analyse de ses motivations avec l’ennéagramme, l’étude de son domaine d’excellence et enfin, quelques mots sur l’ennéagramme et le talent dans la tradition chrétienne.
Une brève biographie du pape François
Jorge Mario Bergoglio est né le 17 décembre 1936 à Buenos Aires.
Ses parents sont d’origine italienne. Son père, Mario, est né à Turin et sa mère, bien que née en Argentine, est une fille d’immigrés italiens.
Il a eu deux frères et deux sœurs.
Jorge Mario Bergoglio est issu d’un milieu assez modeste. Son père était cheminot et sa mère, femme au foyer.
Une révélation précoce
En 1953, à l’âge de 17 ans, il a connu une expérience spirituelle si intense qu’elle a bouleversé l’ensemble de sa vie. Il a découvert sa vocation quand il s’est confessé à un prêtre. Il raconte : « Durant cette confession, il m’est arrivé quelque chose de rare — je ne sais pas quoi exactement —, mais ce fut quelque chose qui a changé ma vie. Je dirais que c’est comme si on m’avait surpris alors que j’avais baissé la garde […] Ce fut la surprise, la stupéfaction d’une rencontre ; je me suis rendu compte qu’on m’attendait. » À ce sujet, Bergoglio ajoute : « J’ai toujours été impressionné par le passage de l’Évangile dans lequel on lit que Jésus posa son regard sur Matthieu d’une manière que l’on pourrait traduire par : “en lui offrant la miséricorde et en le choisissant.” C’est exactement de cette façon que je me suis senti regardé par Dieu durant cette confession. » (3) Après cette expérience, il décide de rompre ses fiançailles pour entrer, à terme, dans les ordres (4).
Bergoglio poursuit ses études, obtient un diplôme de technicien puis travaille dans un laboratoire d’analyses alimentaires.
En 1957, à l’âge de 20 ans, il contracte une pneumonie qui nécessitera l’ablation partielle de son poumon droit.
Le 11 mars 1958, il intègre la Compagnie de Jésus, les jésuites, en tant que novice. Il explique son choix : « La Compagnie de Jésus m’a attiré, car elle était l’avant-garde de l’Église, où l’on utilisait un langage militaire et où régnaient obéissance et discipline. Je l’ai choisie aussi parce qu’elle était orientée vers l’activité missionnaire. » (3) Si son père était heureux qu’il devienne prêtre, sa mère a montré, au début, une certaine réticence.
Il obtient une licence de philosophie en 1963. Puis, entre 1964 et 1966, il enseigne la littérature. De 1967 à 1970, il étudie la théologie.
La prêtrise
Jorge Mario Bergoglio est ordonné prêtre le 13 décembre 1969. Il prononce ses vœux perpétuels chez les jésuites le 22 avril 1973.
Pendant la dictature militaire de 1976 à 1983, l’église argentine était loin d’être irréprochable. Elle a donné sa bénédiction aux généraux et s’est montrée peu concernée par les massacres et les tortures infligées aux opposants par la junte militaire. L’attitude de Jorge Mario Bergoglio durant cette période a fait l’objet de controverses. Mais les critiques dont il a été la cible apparaissent infondées. En effet, Adolfo Perez Esquivel, lauréat du prix Nobel 1980, qui a été emprisonné et torturé par la dictature militaire, a déclaré à la BBC le 13 mars 2013 : « Bergoglio n’a eu aucun lien avec la dictature... je sais personnellement que de nombreux évêques ont demandé à la junte militaire la libération de prisonniers et de prêtres et qu’elle ne leur a pas été accordée. » (2) Le juge German Castelli confirme : « Nous avons vérifié toutes les données et nous sommes arrivés à la conclusion qu’aucune charge ne pouvait être retenue contre Bergoglio. » (3)
Une brillante carrière dans l'Eglise catholique
Jean-Paul II le nomme évêque de Buenos Aires le 20 mai 1992. Puis il est promu archevêque le 28 février 1998.
Jorge Mario Bergoglio devient cardinal le 21 février 2001, toujours sous le pontificat de Jean-Paul II.
Il est élu pape le 13 mars 2013, après la renonciation inédite de Benoît XVI pour des raisons d’âge et de santé. Il choisit le nom de François en se référant à Saint-François d’Assise.
Le pape François a fixé quatre orientations principales au début de son pontificat.
Tout d’abord, il veut conduire une réforme de la Curie. La Curie, qui est le gouvernement et l’administration du Vatican, n’a pas été réformée depuis Paul VI. L’information y circule mal et le carriérisme qui y règne avait déjà été critiqué par Paul VI et Benoît XVI. Le 13 avril 2013, le pape François a installé un groupe de travail de huit cardinaux en vue de bâtir un projet de réforme. Parallèlement, il engage une réforme de la « Banque du Vatican », qui a été mêlée à des scandales financiers.
Ensuite, François veut réactiver l’évangélisation tout particulièrement en Europe.
Par ailleurs, il souhaite lutter contre les violences faites aux chrétiens. En effet, les chrétiens sont souvent persécutés, tout particulièrement en Afrique et en Orient.
Enfin, il souhaite mettre en œuvre un nouveau style de papauté caractérisée par la simplicité et un contact très direct. Il est clair que le nouveau pape a immédiatement réussi à imprimer son style.
François apparaît comme un précurseur à plusieurs titres. Il est le premier pape jésuite, le premier pape américain et le premier pape à avoir choisi le nom de Saint-François d’Assise.
Le type de l’ennéagramme du pape François : le pape François vu par l’ennéagramme
Le comportement du pape François
Recensons, dans un premier temps, les principaux traits de comportement de Jorge Mario Bergoglio.
Il va spontanément au contact des autres.
À ce sujet, il a déclaré : « la conférence d’Aparccida nous a incités à annoncer l’Évangile en allant trouver les gens, et non en restant à attendre qu’ils viennent vers nous. » (3) En 2012, Jorge Mario Bergoglio expliquait ainsi la politique qu’il avait conduite en tant qu’archevêque de Buenos Aires : « Nous cherchons à entrer en contact avec les familles qui ne sont pas impliquées dans les paroisses. Au lieu d’être simplement une Eglise qui accueille et reçoit, nous essayons d’être une Eglise qui sort d’elle même et qui se dirige vers les hommes et les femmes qui ne participent pas à la vie paroissiale, qui ne savent pas grand-chose et sont indifférents à son égard. » (2)
Il se rend toujours disponible et son comportement est empreint de simplicité.
Après qu’il fut nommé archevêque, Jorge Mario Bergoglio souscrivit un numéro de téléphone direct afin que les prêtres puissent le joindre à toute heure (3). Un curé de Buenos Aires se souvient : « lorsqu’on laissait un message, il répondait de suite. » (2) Jorge Mario Bergoglio ne voulait aucune barrière entre lui et ses prêtres. Il souhaitait répondre lui-même au téléphone et tenait son agenda.
Cette disponibilité s’accompagnait d’une excellente connaissance du terrain. Plusieurs prêtres de Buenos Aires témoignent : « Il savait vraiment ce qui se passait dans les rues de nos quartiers. » (2)
L’archevêque de Lyon, le cardinal Barbarin, résume : le pape François « garde vraiment le souci d’être proche des gens », il « a su bien garder le sens des contacts personnels, des relations de proximité » et enfin il « sait favoriser les rencontres. » (2)
Le pape François ne veut surtout pas que les autres se sentent exclus.
Il prescrit de « regarder les gens non pas pour ce qu’ils devraient être, mais pour ce qu’ils sont, et voir ainsi ce qu’il est nécessaire de faire. Sans recettes ni prévisions, mais dans un geste généreux d’ouverture. » (3) Lorsqu’il discute avec des personnes athées, il veille à les mettre à l’aise : « je n’aborde pas, dans un premier temps, la question de Dieu, sauf si ce sont eux qui amènent le sujet. Si nécessaire, je leur dis pourquoi je crois. » (3) À Buenos Aires, il a mis ses idées en pratique en favorisant le baptême des enfants, car selon lui « l’enfant n’est pas responsable de l’état matrimonial de ses parents. Et puis, souvent, le baptême des enfants devient pour les parents aussi un nouveau commencement. » (3)
Bergoglio aide spontanément les autres, tout particulièrement les pauvres et les exclus.
Il se justifie : « N’oublions jamais que le vrai pouvoir c’est le service […] Seul celui qui sert avec amour sait protéger ! » (3)
Ainsi, il se rendait au chevet des prêtres malades et il a accueilli chez lui un évêque auxiliaire âgé qui avait besoin d’aide (3).
Dans les quartiers populaires de Buenos Aires, on le surnommait « l’archevêque des pauvres. » (2) L’avocate Maria Constanza Fazio explique : « Il a été le guide des plus pauvres, en les accompagnant au quotidien à travers des gestes concrets. Il a toujours été présent dans les villes et les quartiers les plus délaissés. » (2)
D’ailleurs, lorsqu’il était archevêque de Buenos Aires, Bergoglio célébrait des messes dans les quartiers populaires et baptisait les enfants de familles pauvres. Le parlementaire argentin Emilio Persico le reconnaît : « Il a célébré pour nous d’innombrables messes, parmi les cartoneros [ceux qui collectent des cartons dans les ordures], parmi les chômeurs, dans les villas miserias. » (3)
Après l’élection de Jorge Mario Bergoglio, le cardinal Claudio Hummes lui a dit : « N’oublie pas les pauvres ! ». Jorge Mario Bergoglio explique : « Cette parole est entrée en moi : les pauvres, les pauvres. Puis tout de suite, en lien avec les pauvres, j’ai pensé à François d’Assise. J’ai ensuite pensé aux guerres, alors que le scrutin se poursuivait jusqu’à la fin de tous les votes. Et François est l’homme de la paix. Et c’est ainsi qu’est venu dans mon cœur le nom : François d’Assise. Il est pour moi l’homme de la pauvreté, de la paix, l’homme qui aime et protège la Création. » (3)
Les proches de Jorge Mario Bergoglio utilisent souvent le terme « miséricordieux » pour décrire sa personnalité (2). La miséricorde peut se définir par la capacité à aimer, à pardonner et à aider celui qui est dans le besoin. Lui-même utilise très souvent le mot. D’ailleurs, pour sa consécration épiscopale, il a choisi la devise : « Lui faire miséricorde et le choisir. » Dans son discours du 7 mars 2013, le cardinal Bergoglio parle de « l’annonce joyeuse de l’amour et de la miséricorde de Dieu. » Lors de la première journée de son pontificat, il déclare aux cardinaux, aux membres du personnel et aux confesseurs dominicains : « Miséricorde, miséricorde, miséricorde […] Vous êtes les confesseurs et par conséquent soyez miséricordieux pour les âmes. Elles en ont besoin. » Après son élection, il dit encore dans une homélie : « Le message de Jésus est la miséricorde. Pour moi, je le dis avec humilité, c’est le message le plus fort du Seigneur. » (3)
Le pape François s’investit pleinement pour les autres.
Le père Facundo affirme : « lui nous soutient concrètement et vient travailler dans la rue avec nous. » (3) Jorge Mario Bergoglio ne se contente pas de dénoncer la pauvreté, mais il veut agir afin de lutter efficacement contre elle. C’est ce qu’affirme le dominicain Alain Durand : « Pour lui, comme il l’a déclaré avec force, la pauvreté est une violation des droits de l’homme. Il ne s’agit donc pas de célébrer le pauvre en prônant une attitude admirative et quasi contemplative à son égard comme cela semble de plus en plus à la mode chez les chrétiens de notre pays, mais de lutter avec les pauvres contre la pauvreté. » À Buenos Aires, si Jorge Mario Bergoglio se mettait au service des autres, il incitait aussi les prêtres et les laïcs à faire de même. Voici d’ailleurs les conseils qu’il donnait aux prêtres : « Pratiquer la miséricorde, avoir du courage apostolique et se rendre disponible pour tout le monde. » Gonzalo Castillo, un membre du groupe des jeunes d’une paroisse de Buenos Aires, se souvient : « Il invitait les catholiques, tout comme les laïcs, à sortir de chez eux et à aider les personnes qui en ont besoin. En fait, c’étaient plus que des invitations, c’étaient des exhortations à la fois fermes et fortes. » Castillo raconte comment Jorge Mario Bergoglio s’adressait aux catéchistes : « Lorsque vous recevez un enfant qui veut commencer le catéchisme, ne lui demandez pas s’il est baptisé ou si ses parents sont mariés ou divorcés. Demandez-lui plutôt ce dont il a besoin. » (2)
Clara Decurgez, une étudiante membre du groupe des jeunes de la paroisse San Martin de Porres, décrit Jorge Mario Bergoglio comme « un homme d’action, qui s’engage corps et âme pour ses fidèles. » (2) Il est prêt à prendre des risques pour les autres. Le père Facundo Beretta Lauria se souvient que les narcos avaient menacé de mort un prêtre. Alors, Bergoglio « a haussé le ton en [leur] disant : “appelez-moi à n’importe quelle heure, quelle que soit la raison, parce que je veux suivre cette histoire personnellement.” » (3)
Très soucieux d’apporter son aide aux autres, Bergoglio se reproche parfois de ne pas en faire assez : « Ce qui me chagrine c’est de ne pas avoir été en maintes occasions compréhensif et bon. » (3) Il s’est notamment reproché, lorsqu’il était évêque auxiliaire de Buenos Aires, d’avoir refusé la confession à un jeune homme qui semblait sous l’emprise de sédatifs. Pris de remords, il fit demi-tour pour confesser le jeune homme (3).
Jorge Mario Bergoglio fait toujours passer ses propres besoins après ceux des autres. Il a même tendance à ignorer ses propres besoins.
Alain Durand constate que Jorge Mario Bergoglio « sait vivre modestement, humblement, en proximité avec ceux qui souffrent de conditions de vie indignes. » (2)
Lorsqu’il était archevêque de Buenos Aires, il avait quitté la luxueuse villa mise à sa disposition pour loger dans un petit appartement. Il avait aussi renoncé à sa voiture avec chauffeur pour prendre les transports en commun. Il justifiait sa décision : « mes paroissiens sont pauvres et je suis l’un des leurs. » (2) Gonzalo Castillo témoigne qu’à l’époque où il était cardinal de Buenos Aires « à chaque fois que le pape François se rendait à la paroisse, il est venu en métro. » (2)
En 2001, Jorge Mario Bergoglio fut nommé cardinal par Jean-Paul II. À cette occasion, il avait refusé de s’acheter de nouveaux habits et avait préféré faire ajuster ceux de son prédécesseur (3).
Son comportement, après qu’il a été élu pape, montre qu’il n’accorde que peu d’importance aux apparences, à ses besoins et à ses désirs. Si le pape François a revêtu la soutane blanche comme ses prédécesseurs, il a refusé la mosette rouge brodée d’hermine qui symbolise le pouvoir pontifical. À l’inverse des autres papes, il ne porte pas une croix en or massif, ni les chaussures rouges, ni l’étole blanche. En quittant le palais apostolique, François a refusé de prendre la voiture réservée au pape et a déclaré : « Je monte dans le bus avec les cardinaux… » (3)
Depuis qu’il est pape, François continue de ranger lui-même ses affaires personnelles dans sa valise. Il a même payé sur ses propres deniers la facture à la Maison du clergé.
S’il n’accorde que peu d’attention à ses propres besoins, il attend aussi de l’institution qu’il dirige qu’elle réduise son train de vie en souhaitant « une Église pauvre pour les pauvres. » (3)
Le pape François est un homme dévoué à la structure à laquelle il appartient.
En effet, il défend la plupart des positions traditionnelles de l’Église catholique même s’il adopte un point de vue libéral sur certains sujets comme le baptême. De plus, il riposte fermement lorsqu’on attaque les idées qui lui sont chères.
Le cardinal Antonio de Buenos Aires a décrit Jorge Mario Bergoglio comme un : « homme discret et très efficace, fidèle à l’Eglise et très proche des prêtes et des fidèles catholiques. » (2)
S’il se montre très ouvert sur le baptême, Jorge Mario Bergoglio refuse que l’Église catholique devienne une organisation non gouvernementale (ONG). Ainsi, il a déclaré, le 18 juin 2008, lors d’une conférence de presse à Québec : « Si l’Eglise veut être progressiste, elle doit assumer son patrimoine historique sans le renier, et aller de l’avant. Si on dit que pour être progressiste, l’Église doit capter toutes les idéologies qui circulent, elle perdra alors son identité et deviendra une ONG. » (2)
Aussi, il s’est fermement opposé au mariage homosexuel voté par le législateur argentin en 2012 : « Ne soyons pas naïfs : ce n’est pas simplement un combat politique, mais une tentative de destruction du dessein de Dieu. Ce n’est pas seulement un projet de loi (ce n’est qu’un outil), mais une “manœuvre” du père du mensonge qui cherche à semer la confusion et à tromper les enfants de Dieu. » (2) En outre, il est opposé à l’euthanasie et fermement contre l’avortement.
Enfin, il faut le prendre tel qu’il est. C’est vrai pour ses idées, mais aussi pour son comportement au quotidien. Après avoir été élu pape, François n’a pas prononcé le discours écrit par le Secrétairerie d’État. Il a composé son propre discours en insistant particulièrement sur le risque de mondanité spirituelle qui menace l’Église. François ne veut pas que les mesures de sécurité destinées à le protéger deviennent un carcan et l’empêchent d’être au contact des autres. Le père Frederico Lombardi conclut : « Assurément, ce pape posera à la sécurité vaticane certains problèmes inédits. » (3) Et il faudra faire avec…
L’ennéatype du pape François
En bref, Jorge Mario Bergoglio va spontanément vers les autres. Il est très disponible et ne veut surtout pas que les gens se sentent exclus. Il aide les autres, s’investit pleinement pour eux et prend des risques pour les soutenir. Il a parfois le sentiment de ne pas leur accorder suffisamment d’attention. Il fait passer ses propres besoins, qu’il a tendance à ignorer, après ceux des autres. Il est dévoué à l’institution à laquelle il appartient. Enfin, il a une personnalité affirmée et exige qu’on le prenne tel qu’il est.
Le pape François est donc type 2 de l'ennéagramme.
Sa motivation positive permanente est de rendre service aux autres et de répondre à leurs besoins. Sa motivation négative permanente est de réprimer ses propres besoins.
Le cœur est le centre privilégié du type 2. François est un homme de cœur. Il parle souvent avec le cœur et place l’amour et la miséricorde au centre de son message et de son action.
Il a besoin d’être porté et aimé tout particulièrement par ses fidèles. Après son élection, il a été le premier pape à demander qu’on le bénisse. Voici ce qu’il avait alors déclaré : « Maintenant, je voudrais donner la bénédiction, mais je vous demande d’abord une faveur. Avant que l’évêque ne bénisse le peuple, je vous demande de prier le Seigneur pour qu’il me bénisse : la prière du peuple qui demande la bénédiction pour son évêque. » (3)
Un individu peut développer des comportements caractéristiques des deux types voisins. Ce sont les ailes. Ainsi, un type 2 peut développer une aile de type 1, une aile de type 3 ou les deux. François a vraisemblablement développé une aile de type 1. Il est très attaché au courant de droit naturel et au respect de la morale chrétienne. Pour lui, le rôle de l’Eglise ne peut pas se limiter à la charité « à la solidarité ou à la simple aide humanitaire » sous peine de venir une simple ONG. François défend la nécessité « d’édifier l’Eglise, l’Épouse du Christ, sur cette pierre angulaire qui est le Seigneur lui-même. » (3) Cela le conduit à rejeter les idées qui ne sont pas conformes aux principes moraux qu’il défend. Ce fut le cas, notamment, des lois qui ont autorisé le mariage homosexuel en Argentine. Sa lecture des problèmes économiques et sociaux révèle une exigence morale très affirmée qui caractérise le type 1. Jorge Mario Bergoglio considère que la crise économique argentine du début des années 2000 était d’abord une crise morale : « En un mot, une corruption généralisée qui mine la cohésion de la nation et lui fait perdre du prestige aux yeux du monde. Tel est le diagnostic. Et au fond, la racine de la crise argentine est d’ordre moral. » Aussi, il dénonce avec force le capitalisme financier : « L’économie de spéculation n’a même plus besoin du travail, elle ne sait plus quoi en faire. On idolâtre l’argent qui se fabrique à partir de lui-même. C’est pourquoi on n’éprouve aucun remords à transformer en chômeurs des millions de travailleurs. » (3)
Le pape François, un type 9 de l’ennéagramme ?
La personnalité apaisante de Jorge Mario Bergoglio pourrait laisser penser qu’il est type 9.
Mais ce serait négliger qu’il est tout à fait capable d’aller au combat et même de s’en prendre aux ecclésiastiques. Ainsi, il s’opposait fermement aux prêtres de son diocèse qui ne voulaient baptiser des enfants nés hors mariage. À ce sujet, il déclarait en septembre 2012 : « Je le dis rempli de tristesse, pardonnez-moi, mais des prêtres de notre région ont refusé de baptiser des enfants de mères célibataires parce qu’ils étaient nés en dehors des liens du mariage. Ce sont les hypocrites d’aujourd’hui. Ceux qui cléricalisent l’Église. Ceux qui écartent du salut le peuple de Dieu. Et cette pauvre fille qui, au lieu de renvoyer son fils à l’expéditeur, a eu le courage de le mettre au monde, voyage de paroisse en paroisse pour le faire baptiser. » (2)
Clara Decurgez décrit sa capacité à trancher : « J’ai confiance en son discernement et en sa persévérance. Il sera capable d’affronter et de clarifier les conflits internes qui commençaient à m’angoisser en tant que jeune catholique pratiquante. » Elle ajoute : « C’est un homme humble, qui sait se montrer à la fois ferme et clair dans ses messages. » (2)
Il n’hésite pas, non plus, à critiquer « la mondanité spirituelle » dans l’Église (3).
Jorge Mario Bergoglio a fustigé les politiques argentins pour avoir légalisé le mariage homosexuel en 2012.
Voici également ce qu’il déclarait au sujet des travailleurs pauvres : « À Buenos Aires, l’esclavage n’a pas été aboli. Ici, il y a des gens qui travaillent encore comme travaillaient les esclaves. » Ses dénonciations répétées de l’injustice sociale ont déplu aux dirigeants politiques argentins Nestor et Christina Kirchner. En effet, après les déclarations de Jorge Mario Bergoglio, ces derniers ont choisi de fréquenter d’autres diocèses (3).
Enfin, lorsqu’on s’attaque aux idées auxquelles il tient le plus, Bergoglio contre-attaque avec virulence.
Jorge Mario Bergoglio n’est donc pas type 9 de l'ennéagramme.
L’orgueil du type 2 de l’ennéagramme
L’orgueil relationnel est généralement le principal obstacle que rencontre le type 2 sur la voie de l’intégration. Il a tendance à penser : je vous aide, mais je n’ai besoin de rien ! Il peut se croire l’objet d’admiration, lorsque son aide est acceptée et appréciée, ou de dénigrement, lorsque son aide est rejetée, sans lien avec la réalité. En effet, le type 2 a tendance à rejeter et à nier ses propres besoins.
C’est pourquoi l’humilité revêt une dimension essentielle pour lui. L’humilité dont nous parlons ici n’est pas la fausse modestie. Cette dernière n’est qu’une expression de l’orgueil. Nous appelons humilité l’acceptation de ce que nous sommes, ni plus ni moins. Cette définition correspond d’ailleurs à celle que donne Jorge Mario Bergoglio : « En étant conscients, en même temps, de nos dons et de nos limites, nous devenons libres de l’aveuglement de l’orgueil. » (2) Ainsi, pour un chrétien de type 2, l’amour du prochain, sans rien attendre en contrepartie et sans rejeter ses propres besoins, est une voie d’intégration privilégiée.
Le talent du pape François : le pape François vu par la talentologie
Essayons maintenant de définir le talent du pape François.
Jorge Mario Bergoglio est un excellent communicant. Il sait parfaitement s’appuyer sur sa personnalité avenante sans avoir besoin de jouer un rôle. Il vit modestement et cela se voit ! Il est sympathique et son style direct est très efficace. Mais, s’il est un communicant de premier plan, il affirme ses convictions avec force, parfois au risque de froisser des susceptibilités.
Bergoglio est cependant plus qu’un excellent communicant. À Buenos Aires, il savait mobiliser ses troupes avec une rare efficacité et son action s’est inscrite dans la durée. Pour parvenir à un tel résultat, il faut plus que des qualités de communicant. Alors que son élection n’était pas attendue, le nouveau pape a d’abord suscité la curiosité. Mais il a su rapidement capter l’attention et créer un intérêt considérable au-delà de la communauté des catholiques pratiquants. En fait, le pape François a le talent d’enthousiasmer ses interlocuteurs et de les faire participer à ses projets. François est un guide, un entraîneur et aussi un pasteur exceptionnel. C’est en cela qu’il se distingue tout particulièrement des autres.
L’ennéagramme et la foi chrétienne
L’étude de la personnalité du pape François est l’occasion de rapprocher les types de l’ennéagramme du comportement du Christ et de dire quelques mots sur le talent.
La miséricorde est la dimension du Christ que privilégie le pape François. Ce choix n’est pas sans fondements. En effet, d’après l’évangile de Jean, le commandement du Christ est : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. » Jean ajoute : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. » Un catholique de type 2 ressent nécessairement la force de ce message, car il correspond à sa motivation positive permanente, à savoir le besoin de rendre service aux autres.
Toutefois, le Christ n’a uniquement uniquement incarné la miséricorde. Que l’on voit en lui l’incarnation de l’homme universel envoyé de Dieu ou la construction d’un personnage conceptuel créé par plusieurs auteurs, la personnalité du Christ emprunte au type 2, mais aussi aux autres types.
Beesing, Nogosek et O’Leary défendent que le Christ incarne l’homme universel dans les neuf types et proposent un « ennéagramme de Jésus. » (1)
Jésus représentait le type 1 puisqu’il était un idéaliste à la recherche de la perfection. Le christianisme est un idéalisme qui se rattache au courant de droit naturel et il emprunte d’ailleurs largement à la doctrine platonicienne.
Jésus a particulièrement bien géré sa petite entreprise d’édification du royaume de Dieu. Il a été un excellent manager pour recruter ses disciples. Il était présent sur le terrain et veillait à la bonne organisation de l’ensemble. Jésus a donc incarné le type 3, très concerné par la réussite de ses actions.
Le Christ exprime aussi les motivations du type 4 par l’originalité même de la vie qu’il a menée. Sa personnalité était assurément singulière. Il montrait également une exceptionnelle capacité de compassion.
Jésus adoptait également les motivations du type 5 lorsqu’il recherchait la solitude et la connaissance par la réflexion et l’observation.
Jésus s’est montré très loyal envers Dieu et les siens. D’après Matthieu, le Christ a déclaré : « Ne pensez pas que je sois venu pour abolir la loi ou les prophètes. Je suis venu non pour abolir, mais pour accomplir. » Il s’agit là d’une attitude tout à fait conforme à celle d’un type 6 face aux lois qu’il reconnaît et accepte.
Jésus aimait passer un bon moment avec ses disciples. Il était joyeux. Lors des noces de Cana, il a même transformé l’eau en vin pour la plus grande joie des convives. Comme le type 7, Jésus a recherché le plaisir même s’il a dû, aussi, affronter la souffrance.
Jésus incarnait le type 8. C’était un chef qui pouvait recourir à la force afin de faire régner la justice. La façon dont il chasse les marchands du temple en est une bonne illustration.
L’un des principaux objectifs de Jésus était la recherche de la concorde et de la paix. Aussi, le Christ pouvait montrer une grande patience. Ce sont là des traits de comportement du type 9.
Un chrétien n’est pas donc nécessairement de type 2. Chaque type peut intégrer, à sa façon, le message du Christ.
Le talent et la tradition chrétienne
Enfin, la parabole des talents de Matthieu est une ferme exhortation, pour les chrétiens, à faire fructifier leur talent : « En effet il en va comme d’un homme qui, partant en voyage, appela ses serviteurs et leur confia ses biens. À l’un il remit cinq talents, à un autre deux, à un autre une seul, à chacun selon ses capacités, puis il partit. Aussitôt celui qui avait reçu les cinq talents s’en alla les faire valoir et en gagna cinq autres. De même celui des deux talents en gagna deux autres. Mais celui qui n’en avait reçu qu’une s’en alla creuser un trou dans la terre et y cacha l’argent de son maître. Longtemps après arrive le maître de ces serviteurs, et il règle ses comptes avec eux. Celui qui avait reçu les cinq talents s’avança et en présenta cinq autres, en disant : Maître, tu m’avais confié cinq talents ; voici cinq autres talents que j’ai gagnés. Son maître lui dit : C’est bien bon et fidèle serviteur, tu as été fidèle en peu de choses, sur beaucoup je t’établirai ; viens te réjouir avec ton maître. Celui des deux talents s’avança à son tour et dit : Maître, tu m’avais confié deux talents ; voici deux autres talents que j’ai gagnés. Son maître lui dit : C’est bien, bon et fidèle serviteur, tu as été fidèle en peu de choses, sur beaucoup je t’établirai ; viens te réjouir avec ton maître. S’avançant à son tour, celui qui avait reçu un seul talent dit : Maître, je savais que tu es un homme dur : tu moissonnes où tu n’as pas semé, tu ramasses où tu n’as pas répandu ; par peur, je suis allé cacher ton talent dans la terre ; le voici, tu as ton bien. Mais son Maître lui répondit : mauvais serviteur, timoré ! Tu savais que je moissonne où je n’ai pas semé et que je ramasse où je n’ai rien répandu. Il te fallait donc placer mon argent chez les banquiers : à mon retour, j’aurais recouvré mon bien avec un intérêt. Retirez-lui donc son talent et donnez-le à celui qui a les dix talents. Car à tout homme qui a, l’on donnera et il sera dans la surabondance ; mais à celui qui n’a pas, même ce qu’il a lui sera retiré. Quant à ce serviteur bon à rien, jetez-le dans les ténèbres du dehors : là seront les pleurs et les grincements de dents. » (La Bible, Nouveau Testament, Traduction œcuménique, Matthieu, Chapitre 25, Versets 14 à 30).
Cette méthode s’adresse aussi aux non-croyants... Bien entendu, vous n’avez aucune obligation de croire en une divinité, en une religion ou de vous convertir pour reconnaître et utiliser votre talent. Et si vous trouvez le mot talent trop « connoté », je vous suggère de le remplacer par l’expression « domaine d’excellence. »
Bibliographie sur le pape François
(1) Maria Beesing, Robert Nogosek et Patrick O’Leary, L’ennéagramme un itinéraire de la vie intérieure, Desclée de Brouwer, 1992
(2) Michel Cool, François, Pape du Nouveau Monde, Éditions Salvator, 2013
(3) Andrea Tornielli, François le pape des pauvres, Bayard, 2013
(4) Wikipédia, Consultation du 23 avril 2014
Si l'ennéagramme et la théorie des talents vous intéresse, vous pouvez lire :